BINOT PAULMIER DE GONNEVILLE
ou
LE MYTHE DES TERRES AUSTRALES
A la grande époque de l’histoire maritime de Honfleur, du XVIe au XVIIIe siècle, Binot Paulmier De Gonneville fut la première figure emblématique de tous les marins honfleurais qui se distinguèrent pendant 300 ans sur toutes les mers du globe.
Avec le recul des années, des siècles devrais-je dire, Gonneville fut certainement le plus valeureux, le plus modeste, et tout en même temps, le plus malchanceux des grands marins honfleurais du XVIe siècle.
Cependant, pour tous ceux qui s’intéressent un tant soit peu à l’épopée des Grandes Découvertes maritimes, c’est un personnage incontournable qui par le fait de sa malchance même, a fait rêver tous les marins européens, tous les géographes, tous les monarques pendant le XVIIIe siècle.
En sus de ses exploits de marin, Gonneville fit preuve d’un humanisme étonnamment moderne pour un homme tout imprégné de valeurs encore moyenâgeuses.
Un tel homme, me direz-vous devrait donc figurer au Panthéon des grands découvreurs de l’au-delà des mers.
Il n’en est rien pourtant. Aujourd’hui, en dehors d’un petit cercle restreint de géographes, d’historiens et d’amoureux de l’histoire de Honfleur, Gonneville est un inconnu, même dans sa ville natale.
Il a certes droit, à Honfleur, à une artère qui porte son nom, Le Quai Lepaulmier.
Je gage qu’un petit sondage auprès de la population honfleuraise donnerait des résultats accablant quant à la connaissance des habitants, de l’histoire de Gonneville…
Pourtant, depuis un siècle, un certain nombre de documents et d’ouvrages ont rappelé l’existence et l’histoire, si ce n’est les mérites de Gonneville, sans pour autant sortir de l’oubli, auprès du grand public, un homme dont l’aventure ne fut pas banale et qui influença involontairement nombre de découvreurs de terres nouvelles jusqu’à la fin du XVIIIe siècle.
A l’instar de Jean Denis, autre grand marin de Honfleur dont l’épopée a été rapportée à l’origine, non pas par un français mais par le géographe vénitien Ranuzio en 1550 (Raccolta Mlle Navigazioni et Viaggi), faute de quoi, son destin aurait été complètement ignoré, Paulmier De Gonneville doit aujourd’hui à un professeur de São Paulo, non pas la une des journaux, mais une étude passionnante et remarquablement documentée qui réveillera peut-être les esprits curieux et donnera à notre marin honfleurais, la place qu’il devrait avoir parmi les découvreurs français du XVIe siècle.
Avec ses deux associés et une soixantaine de marins honfleurais, Gonneville quitte Honfleur en juin 1503 sur un petit bateau de 100 tonneaux, une coque de noix baptisée l’Espoir et part à la conquête de l’Atlantique sud.
En fait, il ne savait pas exactement où il allait. Les Portugais, qui venaient de découvrir, grâce à Cabral, le nord du continent sud américain, étaient très discrets quant à la position géographique exacte des territoires qui s’appelleront plus tard le Brésil, et qu’ils considéraient comme leur chasse gardée.
Après six mois d’errance dans l’Atlantique, ils atteignirent enfin une côte inconnue que Gonneville baptisera la Côte des Perroquets.
Ce n’est que 300 ans plus tard que D’Avezac, le grand géographe et historien, situera à coup sûr la Côte des Perroquets au Brésil, entre Porto Allegre et São Paulo, dans la région de Santa Catarina.